lundi 21 mars 2011

Assainissons notre diplomatie en Tunisie

Argenteuil, le 19 mars 2011

Lettre recommandée avec A/R


Monsieur le Ministre d’État, Ministre des Affaires Etrangères et Européennes.

Créé par des binationaux et des Français, rassemblant des citoyens de sensibilité diverse, le collectif « La Nouvelle Tunisie » est fier de la révolution en cours conduite par le peuple Tunisien.

Soucieux que cette révolution puisse aboutir à l’établissement d’acquis démocratiques soutenables, nous caressons l’espoir qu’un régime politique réellement républicain et démocratique dans un esprit laïc vienne se substituer durablement à la dictature aujourd’hui révolue.

Nous estimons que cette révolution a non seulement une résonnance similaire à celle qui s’est produite en France en 1789 mais également à celle qui s’en est suivie sur la période 1965/1984 et qui a notamment permis de réduire les inégalités en France.

Au nom de toutes ces valeurs communes entre la France et la Tunisie, nous nous permettons d’appeler votre attention ministérielle sur le déroulé inédit de la première conférence de presse organisée par Monsieur l’Ambassadeur de France récemment désigné à Tunis.

Vous aurez sans doute noté que ses propos et son comportement ont choqué et profondément blessé les Tunisiens mais également un nombre très important de binationaux, parmi lesquels les membres de notre collectif.

Si nous avons effectivement bien noté, à une journaliste qui lui demandait simplement ce qu’il pouvait répondre « aux préoccupations du peuple tunisien par rapport au comportement de la France durant la révolution », sa réponse s’est révélée incroyablement singulière et en décalage patent avec les enjeux diplomatiques en cours et à venir.

Il s’est, en effet, contenté de répondre que la question lui ayant été posée serait, selon lui, un présumé préjudice et il a même jugé opportun d’ajouter que cette question serait « débile » (sic).

Vous conviendrez certainement, Monsieur le Ministre d’État, que Monsieur l’Ambassadeur de France semble avoir oublié les impératifs dus à ses éminentes fonctions !

Sauf le respect dû à ses fonctions, ses propos révèlent un manque évident de discernement diplomatique et que cette attitude hautaine va à l’encontre de sa mission de diplomate.
De surcroît, la Tunisie qui est en train de vivre dans sa chair une période exceptionnelle de son histoire mérite mieux, beaucoup mieux, qu’une telle attitude acrimonieuse.

En l’espèce, le collectif « La Nouvelle Tunisie » juge utile de vous faire part du fait que le haut fonctionnaire précité n’a pas su incarner les valeurs communes qui lient les deux pays.

En tant que binationaux et en tant que Français attachés à la culture de la Tunisie et au rayonnement de ce pays tant au plan économique que politique, il nous est impossible de nous sentir dûment représentés par l’actuel Ambassadeur de France à Tunis

Pire encore : il est permis de penser qu’il ne pourra plus jouer un rôle efficient dans la diplomatie française en Tunisie, car ses premiers pas l’ont semble-t-il irrévocablement discrédité. Nous en voulons pour preuve le fait que les Tunisiens continuent à réclamer son départ…

Qu’elles soient sincères ou non, ses excuses présentées tardivement n’ont pas changé la donne et la vive colère populaire contre son comportement est restée intacte.

Monsieur le Ministre d’État, nous sommes convaincus de votre attachement à l’image de la diplomatie française à travers le monde, ainsi que de votre volonté personnelle de participer à un renouveau du ministère dont vous avez à nouveau la charge.

En tant que citoyens éclairés, nous partageons ces objectifs et vous demandons, par conséquent, de bien vouloir accepter de mettre fin dans les meilleurs délais à la source majeure de crispation diplomatique que représente l’actuel Ambassadeur de France en poste à Tunis.

Seul le départ de Monsieur Boris BOILLON pourra contribuer à amorcer une revalorisation de la diplomatie et de la politique françaises aux yeux des tunisiens qui sont plus que jamais méfiants des grandes puissances.

Soyez convaincu, Monsieur le Ministre d’État, que notre présente requête n’est empreinte d’aucune considération partisane. Elle illustre au contraire notre souci collectif, auquel nous sommes viscéralement attachés, de voir revitalisés les liens entre les deux pays.

Vous remerciant par avance pour votre réponse à venir, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre d’État, l’expression de notre considération distinguée et de notre profond respect.



Pour le collectif « La Nouvelle Tunisie »
p/o

Ali ROMDHANE.
Porte parole.